L’entrepreneur est une personne physique ou morale qui prend l’initiative d’exercer une activité économique donnée et qui pour se faire réunit un capital, recrute un personnel et se procure les biens, matériel et marchandises, nécessaires à l’exploitation de cette activité. L’ensemble ainsi formé porte le nom d’entreprise. La notion d’entreprise est récente. Elle était ignorée du Code de commerce de 1806. Celui-ci citait l’entreprise à l’article 632 dudit code, mais le mot était pris dans le sens de « profession » et n’avait pas la même signification qu’aujourd’hui. L’entreprise joue un rôle considérable dans l’économie d’un pays moderne, non seulement parce qu’elle permet la circulation des richesses, mais encore par ce qu’elle est une source d’emplois ; on peut ajouter qu’elle est une école de caractère. Conscient de cette importance, le législateur a fondé en 1979 une Agence nationale pour la création d’entreprise (A.N.C.E.). Une loi du 9 juillet 1984 sur le développement de l’initiative économique a « institué un livret d’épargne entreprise destiné à financer la création ou la reprise d’entreprises quelle qu’en soient la forme juridique ou le secteur d’activité ». Le législateur s’est préoccupé ainsi d’empêcher la disparition des entreprises, ou du moins d’en maintenir la survie : c’est le sens de la loi du 25 janvier 1585 sur le redressement et la liquidation judiciaires.
Aucun texte légal ne définit l’entreprise, bien que de nombreuses lois en reconnaissent l’existence et même la permanence. Du point de vue du droit communautaire, l’article 85 du Traité de Rome déclare incompatible avec le marché commun tous accords entre entreprises qui auraient pour objet d’empêcher de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence. Et l’article suivant (art. 86) interdit « à une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ». A l’étranger, l’ordonnance suisse du Registre du commerce définit l’entreprise comme a une activité économique exercée en vue d’un revenu régulier. Le Code civil italien y voit une organisation structurée en vue d’une activité.
L’entreprise est commerciale lorsqu’elle a pour objet une des activités visées aux articles 632 et 633 du Code de commerce : entreprises de manufactures, de commission, de transport, d’agence de bureaux d’affaires, etc. Elle est civile lorsque l’activité exercée est civile c’est-à-dire par exemple, agricole, artisanale ou libérale.
Le sort de l’entrepreneur étant étroitement lié à celui de l’entreprise nous étudierons dans une première partie les traits dominants qui permettent de qualifier l’entreprise et dans une seconde partie le rôle joué par l’entrepreneur.
L’entreprise est caractérisée par trois éléments : l’absence de personnalité morale ; le fait d’accomplir une activité économique ; l’existence de moyens mis à sa disposition par l’entrepreneur.
L’entreprise individuelle n’a jamais été reconnue comme une personne morale par la loi ni par les tribunaux.
La Cour de justice des communautés européennes avait alors reconnu dans un arrêt du 22 mars 1961 que l’entreprise « s’identifiait au concept de personne physique ou morale », mais elle n’a pas continué de maintenir cette qualification.
La Cour de cassation pour sa part, considère que la personnalité morale n’est pas une création de la loi et qu’elle appartient, en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes d’être juridiquement protégés (civ. 28 janvier 1954 0-1954.217). Jusqu’à maintenant les intérêts de l’entrepreneur et ceux des salariés ne font pas suffisamment corps les uns avec les autres pour qu’il y ait une expression collective de l’entreprise. En conséquence l’entreprise n’a pas de personnalité morale, alors qu’une société, association, G.I.E. sont dotés de celle-ci. Il s’ensuit que lorsque la loi confère des droits et impose des obligations à une entreprise, les droits et obligations doivent être attribués à la personne physique ou morale qui a la qualité d’entrepreneur. L’entrepreneur doit donc payer toutes les dettes contractées pour les besoins de l’entreprise. Il y est tenu sur tous ses biens, présents et à venir, sur lesquels ses créanciers ont un droit de gage général (créancier chirographaire). Le patrimoine de l’entreprise et le patrimoine de l’entrepreneur ne font qu’un seul et même patrimoine.
L’exercice d’une activité économique apparaît comme le second critère de qualification de l’entreprise. Cette activité doit être exercée de façon autonome. Elle doit consister en une répartition d’actions déterminées. Des actes épisodiques ou occasionnels ne sauraient caractériser une activité. L’entreprise doit avoir une activité économique. Est considérée comme activité économique toute activité qui a pour objet la production et, ou l’échange de biens ou de services, dès lors qu’elle est exercée non pour les besoins personnels de celui qui s’y livre, mais en vue de satisfaire les besoins des tiers exprimés sur le marché. Il importe peu que l’activité soit exercée dans une intention lucrative ou dans un but désintéressé. Ainsi, une association qui exploite un club de rencontres, un centre de loisirs, un centre de formation et d’éducation, une radio locale privée, peut être considérée comme ayant une activité économique.
L’entreprise doit disposer de moyens pour mettre en oeuvre le but qu’elle se propose d’accomplir. Les moyens peuvent être humains : personnel, salariés, dirigeants, ou matériels : outil de travail, c’est-à-dire des locaux (bureaux. entrepôts), biens d’équipement, marchandises.
La présence d’un personnel n’est pas cependant une condition indispensable pour qualifier juridiquement l’entreprise. La qualification de celle-ci peut être retenue en tenant compte uniquement de l’existence et de la consistance des biens matériels affectés à l’activité de l’entreprise. Si les biens sont importants, on pourra retenir la qualification d’entreprise. En revanche, s’ils sont minimes, le juge y trouvera un argument pour rejeter celle-ci.
Il faut souligner néanmoins que la présence d’un personnel n’est pas une condition indispensable de la qualification juridique d’entreprise ainsi une entreprise peut fonctionner sans personnel : Exemple, une entreprise qui fabriquait des pâtes alimentaires. sans personnel. seulement avec des machines, a pu être considéré comme une entreprise de manufacture, ainsi en ont décidé les conseillers à la Cour de cassation.
L’entrepreneur est celui qui a choisi d’exercer une activité économique en acceptant les chances et les risques inhérents à cette activité.
L’entrepreneur se distingue du chef d’entreprise, il a des obligations et dispose de certains droits.
L’entrepreneur est celui qui jouit des biens de son entreprise. Ce peut être une personne physique ou morale qui est propriétaire, personnel ou indivis de ces biens ou qui en est simplement usufruitier ou locataire. Le chef d’entreprise est celui qui assume la direction de l’entreprise. Les deux qualités peuvent être réunies dans une même personne. Mais, sauf obligation expresse de la loi (cas des pharmaciens par exemple, art. 574 du Code de santé publique), l’entrepreneur n’est pas tenu lui-même d’assurer la direction de l’entreprise.
Lorsque l’entrepreneur est une personne morale, comme celle-ci est une entité abstraite qui ne peut pas exprimer sa volonté ni exercer d’autorité, la dissolution est automatique : la personne morale de l’entrepreneur, et la personne physique qui la représente est le chef d’entreprise.
Le chef d’entreprise a des pouvoirs et une responsabilité.
Il exerce l’activité de direction de façon indépendante et sans lien de subordination. Il accomplit tous les actes nécessaires au fonctionnement et à l’exploitation de l’entreprise quelles qu’en soient la nature et l’importance: il peut conclure des contrats, diriger des salariés, modifier l’organisation interne de l’entreprise, etc...
L’entrepreneur est responsable civilement, il est tenu de réparer tous les dommages causés par le fonctionnement de l’entreprise, que ceux-ci surviennent à l’occasion de l’exécution d’un contrat, ou en dehors de tout contrat entre l’entrepreneur et la victime.
Le chef d’entreprise a aussi une responsabilité pénale aussi diverse que lourde qui est la contrepartie de ses pouvoirs très étendus. On considère qu’étant à la tête de l’entreprise, il est responsable des infractions commises à l’occasion du fonctionnement de celle-ci et ce, même s’il n’a pas participé personnellement à l’acte matériel constitutif de l’infraction. Il est également responsable des infractions à la réglementation spéciale liée à l’activité propre de l’entreprise ainsi que des infractions à la réglementation générale applicable à toutes les entreprises quelle que soit la nature de son activité (droit du travail, fiscalité, douanes). Il est responsable, de plus, de toute infraction due à un défaut de surveillance ou à une imprudence ayant entraîné un dommage corporel.
L’entrepreneur doit se faire immatriculer, pour les relations avec les administrations, sous un numéro d’identification administrative.
Les entreprises sont identifiées, depuis le 10 janvier 1975, par un numéro d’ordre inscrit au répertoire national des entreprises et des établissements. Le répertoire centralise toutes les informations relatives aux entreprises qui sont exigées par la loi. Les entreprises, c’est-à-dire toutes les personnes physiques et morales exerçant de manière indépendante une activité professionnelle non salariée, les commerçants, les artisans, les professions libérales sont enregistrées sous un numéro d’identification (numéro SIREN : Système Informatique du Répertoire des Entreprises) qui comprend neuf chiffres.
D’autre part, l’établissement, c’est-à-dire le bien où s’exerce l’activité matérielle de l’entreprise est lui-même identifié par un numéro différent (dit SIRET: Système informatique du répertoire des Établissements). Les numéros sont utilisés pour la correspondance avec l’administration.
L’identification des entreprises est complétée par l’indication de la nature de l’activité principale exercée par l’entreprise à l’aide d’un numéro attribué par l’ I.N.S.E.E., dit Code APE, qui n’a aucune valeur juridique et remplit seulement un rôle statistique.
L’entrepreneur doit ainsi choisir le domicile de son entreprise. Le domicile est le lieu où l’entreprise a son centre d’activité, c’est à dire où se trouvent ses organes de direction et d’administration. Le choix est libre, sauf les règles qui sont imposées par les lois sur l’urbanisme. L’entrepreneur peut ne pas faire coïncider le domicile de son entreprise avec la domiciliation fiscale de celle-ci.
L’entrepreneur peut installer le centre d’activité de son entreprise dans les locaux occupés par une autre entreprise qui «l’héberge» provisoirement ou encore dans ceux d’une société qui fait profession de louer des locaux aux entreprises, dite société de domiciliation, ou enfin une domiciliation temporaire au domicile du futur dirigeant (limitée à deux ans, lors de la création de la personnes morale).
L’obligation de tenir une comptabilité est expressément imposée aux commerçants par la loi (art. 8 du Code de commerce). Mais elle existe aussi indirectement à la charge de toute entreprise même civile, dont les résultats sont imposés selon le régime fiscal de l’imposition au réel. A défaut des sanctions pénales peuvent être prononcées contre l’entrepreneur.
L’entrepreneur est tenu de réparer tous les dommages causés par le fonctionnement de l’entreprise, que ceux-ci surviennent à l’occasion de l’exécution d’un contrat (Responsabilité contractuelle arts. 1137 et 1147 du Code civil), ou en dehors de tout contrat entre l’entrepreneur et la victime (responsabilité délictuelle arts 1382 et s. du Code civil).
L’entrepreneur subit personnellement les condamnations pénales qui sanctionnent les infractions qui frappent L’entreprise. Cette responsabilité est distincte de celle du chef d’entreprise.
L’entrepreneur peut faire interdire notamment la divulgation, à des fins d’information exclusivement économique, du montant de sa fortune personnelle, s’il prouve que cette divulgation porte atteinte à l’intimité de sa vie privée (possibilité d’action en référé).