LA CAUSE DANS LES CONTRATS

La cause est la raison immédiate et directe de l’engagement du débiteur envers le créancier.

Exemple : dans le contrat de vente la cause de l’obligation du vendeur (de livrer la chose) est l’obligation de l’acheteur (de payer le prix et réciproquement).

La cause est d’après l’art. 1108 du Code civ., le quatrième élément nécessaire à la validité d’un contrat. Elle fait l’objet des articles 1131, 1132, 1133 du Code civ.

Si on observe la jurisprudence, on remarque que le juge a souvent recours à ces articles du Code civ., pour annuler bon nombre de contrats pour absence de cause ou cause illicite.

En effet, à chaque fois que le juge constate l’absence de cause, 1’illicéité ou la fausse cause la conséquence immédiate est le prononcé de la nullité du contrat (art. 1138 du Code civ.).

Pour le droit romain la «causa» était la formalité «verba» la remise de la chose ou l’accomplissement du "factum" nécessaires pour la naissance du contrat formaliste réel ou innommé : c’était la cause efficiente, génératrice du contrat.

Les auteurs du XVIè siècle, pour éviter que le pouvoir du juge compromette la stabilité du contrat ont songé à le limiter au moyen d’une distinction précisée par DOMAT et reprise par POTHIER (rédacteur du Code civil) entre la cause et le motif. Le Code civil n’a entendu que maintenir la cause de l’obligation.

La cause, condition d’existence de l’obligation

La cause est le but que poursuivent les parties en contractant.

  1. Absence de cause
  2. L’absence de cause est établie lorsque la personne qui l’invoque apporte la preuve que le contrat n’impose à son cocontractant aucune obligation ou ne lui impose que des obligations dérisoires par rapport à celles dont elle est tenue. Par exemple :

    Dans les contrats aléatoires, l’absence de cause ne peut pas être invoquée par la personne qui a accepté l’aléa puisque ce faisant elle a accepté d’avance l’éventualité de l’absence de contrepartie à ses propres engagements. Sur les contrats aléatoires, l’existence ou l’absence de la contrepartie doit être appréciée objectivement, indépendamment de l’utilité réelle qu’elle peut présenter pour le demandeur.

    Cette solution est nettement affirmée pour les contrats faisant double emploi avec un autre (Civ, 29 juin 1959, Bull. 1,267 : validité de deux contrats d’assurance dès lors que l’assuré pouvait demander, à son choix l’exécution de l’un ou de l’autre ; Civ. 22 juin 1977, Bull. I, 232 : validité de deux ventes consenties chacune moyennant un prix converti en bail à nourriture, la venderesse pouvant demander à l’un ou à l’autre acheteur l’exécution de son entière obligation.

  3. La fausse cause

    La fausse cause est aussi un cas de nullité du contrat (art, 1131 C. civ.). Elle se rencontre cependant bien plus rarement que l’absence de cause ou la cause illicite ou immorale.

    Elle consiste pratiquement dans le fait qu’un contractant s’est trompé sur la raison qu’il avait de s’engager. Par exemple :

    • lorsqu’un preneur a renoncé au bail qu’il possédait dans un immeuble. sur l’affirmation mensongère du notaire que ce bail était nul (Req. 13 déc. 1927. S. 1928.1.125) ;
    • lorsque l’exploitant d’un cinéma promet, parce qu’il s’en croit à tort légalement tenu, d’indemniser un artiste dont le matériel a été détruit dans un incendie (Req. 1er juil. 1924, D.H. 1924.509) ;
    • lorsqu’un laboratoire a promis de verser des redevances pour exploiter un produit alors qu’il avait avant de prendre cet engagement obtenu les visas afférents audit produit (Aix. 13 janv. 1977. Bull. Cour d’Aix, 1977/1 p. 4).

  4. La cause simulée
  5. C’est celle que les parties énoncent dans l’acte en sachant qu’elle n’a pas de réalité, par exemple, elles déguisent une donation sous l’apparence d’une vente.

    En principe, la simulation n’est pas, par elle-même, un motif de nullité de la convention. En effet, il y a lieu de rechercher la cause véritable, celle-ci si elle est licite servira de support à l’obligation. L’obligation en revanche sera nulle si, en réalité, il n’y a pas de cause ou si la cause véritable est illicite.

    En revanche, la nullité pour cause illicite ne peut pas être prononcée lorsque le demandeur se trouvait dans l’ignorance du but illicite poursuivi par son cocontractant (Civ. 4 déc. 1956. J.C.P. II.10008, Note J. Mazeaud).

 

La cause immorale ou illicite

  1. La cause illicite
  2. La cause est illicite lorsqu’elle est prohibée par la loi ou lorsqu’elle est contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs (art. 1133 Code civ.).

    En pratique, il y a cause illicite lorsque le but poursuivi par les cocontractants, celui qui explique et justifie la création de leurs obligations réciproques, est lui-même illicite.

    Tel est le cas, par exemple, lorsque le contrat a été conclu :

    L’illicéité de la cause peut être trouvée par tous moyens (Civ. 10 oct. 1968, Bull. III.285).

    Lorsque la cause est illicite, la convention est nulle et les parties qui ont sciemment conclu cette convention ne peuvent fonder sur elle ni une action en exécution ni une action en réparation du préjudice qui a pu en résulter pour elles (Civ. 27 déc. 1945, G.P. 1946.1.88; Soc. 29 act. 1957. Bull. IV .731).

     
  3. La cause immorale
  4. La situation normale étant la conformité des contrats à l’ordre public et à la morale, tout contrat est présumé avoir une cause licite et morale.

    En conséquence il incombe à celui contractant ou tiers qui invoque l’immoralité de la cause de la prouver (Civ. 22 déc. 1986, D.P. 1898.1597).

    La cause sera immorale chaque fois que les parties au contrat auront porté atteinte aux bonnes mœurs (art. 6 du Code civ.).

    Il appartient aux tribunaux de déterminer au regard de l’évolution des mœurs si la cause est immorale ou non