La mise en vente de TF1 donna lieu à de nombreux débats dans l’opinion public; certains déclarant que de part sa mission et son passé elle se trouvait intégrée dans le patrimoine national et qu’à ce titre elle ne pouvait être cédée, d’autres affirmant au contraire qu’une telle mission n’incombait pas uniquement à la puissance publique et qu’une ouverture dans ce domaine à des capitaux privés s’imposait.
En l’espèce, l’acquéreur se voyait imposé un cahier des charges relativement strict et contraignant tant pour le nombre annuel de films projetés que le temps limité imposé pour les flashs publicitaires. Ces dispositions répondaient aux vœux de certains exprimant la volonté de garantir un mieux disant culturel.
L’État, autorité de puissance publique, l’administration se trouvent fréquemment conduits à passer des contrats avec les entités les plus diverses pour répondre à l’éventail très large de leur mission.
Mais quelles sont précisément les dispositions comportant le caractère administratif du contrat ?
Quels sont les soubassements juridiques de ce contrat ?
Le régime de droit
commun des contrats n’est-il pas réduit à sa plus simple expression.
L’administration lorsqu’elle désire passer un contrat peut disposer d’une option consistant à choisir soit le contrat de droit privé et donc d’adopter le régime de droit commun ou au contraire le contrat administratif organisé et soumis à des règles particulières.
Le contrat administratif se distingue par ses parties mais surtout par ses dispositions dont certaines peuvent être imposées de manière unilatérales ou comportant des obligations. exorbitantes du droit commun des contrats. Passé par écrit, bien que des contrats verbaux puissent exister, il revêt la valeur d’un acte authentique. En outre il comporte souvent un cahier des charges élément constitutif de celui-ci, déterminant les conditions dans lesquelles le contrat auquel il s’applique est exécuté. Il a pour objectif majeur de guider les administrateurs.
La diversité des contrats administratifs est très étendue, elle regroupe la concession de service public et l’affermage contrat administratif à raison de leur objet, le marché public contrat administratif par détermination de la loi, les marchés de fournitures, les marchés de prestations intellectuelles. Cette liste n’est pas exhaustive.
Toutefois, cette pluralité des contrats n’empêche pas la réunion d’éléments communs qu’il nous appartiendra de démontrer. Ainsi nous pourrons constater leur particularité et ce en quoi ils s’écartent du régime de droit commun. Cependant il ne s’agit pas de faire une étude comparative. De même, l’étude et ses critères va nous permettre de définir plus clairement ce contrat.
Au surplus, il apparaît intéressant de préciser les degrés de contrainte qu’un contractant, partie à ce contrat, pourra supporter et à quelles obligations il s’expose. Dans ce domaine il faut souligner le rôle primordial posé par la jurisprudence administrative pour définir le contrat et pour en organiser l’articulation ainsi que les limites des clauses exorbitantes que celui -ci pourrait contenir.
Il convient donc d’examiner les qualifications du contrat ( A ) à travers ces éléments les plus déterminants pour envisager ensuite les conséquences d’une telle qualification principalement sur le plan du régime du contrat administratif ( B ).
Le contrat peut être administratif par détermination de la loi, à partir des critères relevés par la jurisprudence indépendamment du choix de l’administration partie au contrat. Il importe dès lors de connaître les critères déterminants pour opérer une telle qualification, critères fondés soit sur les personnes parties au contrat soit sur les dispositions particulières exprimées dans ce contrat.
Le contrat administratif doit répondre à une très grande variété de situations, dès lors les parties au contrat sont souvent d’origine variée, néanmoins les personnes morales de droit public (État, Régions, département, commune, E.P.A.) l’animent presque toujours.
Il convient en conséquence d’examiner ces différentes personnes morales de droit public.
Les personnes morales rassemblent plusieurs institutions variées dans leurs composants comme dans l’étendue de leurs pouvoirs. La plus représentative est sans nul doute l’ État, mais derrière cette entité se cache surtout l’administration publique véritable exécutrice des impulsions politiques. De manière régulière l’administration se trouve partie au contrat. De même, les collectivités territoriales composées des régions, des départements, des communes, peuvent conclure des contrats répondant à leurs multiples missions.
Cependant ces différentes institutions n’ont pas l’exclusivité dans ce domaine. Les établissements publics industriels et commerciaux sont fréquemment conduits à poser de tels contrats dans l’exécution de leur mission. E.D.F., la S.N.C.F. concluent des contrats administratifs dans le cadre de leurs domaines d’intervention. Il en est de même des établissements publics administratifs comme les P.T.T.
Autant donc de parties au contrat administratif et qui vont lui conférer un caractère particulier.
Dès lors, la réunion de deux personnes publiques entraîne la qualification administrative du contrat posé entre elles. Malgré tout, il convient d’observer que ce n’était pas le seul cas de figure.
De même, le contrat peut être administratif alors qu’une personne morale de droit privé se trouve partie à celui-ci ; toutefois elle devra contracter avec une autre personne publique pour lui imprimer le caractère administratif.
Il parait néanmoins nécessaire de préciser qu’un contrat peut être administratif alors qu’il se trouve conclu par deux personnes morales de droit privé. Cette solution n’est possible que si l’une des deux se trouve être le mandataire d’une personne morale de droit public. La partie au contrat agissant alors au nom de la collectivité qui est ainsi partie au contrat passé avec une autre personne civile.
Les parties au contrat ne sont pas les seuls critères permettant de conférer la qualification de contrat administratif. Il faut aussi examiner les clauses que celui-ci peut aussi comporter.
Les deux critères principaux ont été dégagés par la jurisprudence et permettent d’examiner le particularisme du contrat administratif et d’observer en quoi il se détache du contrat de droit commun.
Le critère du service public exprime l’idée de participation du cocontractant à l’exécution même du service public.
Il ne s’agit pas d’une simple collaboration (arrêt époux Bertin) et c’est la définition de l’objet du contrat qui doit alors être précisé et contrôlé pour dégager ce caractère.
Néanmoins, la distinction entre collaboration et participation ne s’établit pas toujours très facilement.
En outre, le contrat peut être en lui-même une modalité d’exécution du service public au regard des faits ou des actes des personnes morales de droit public.
Il faut donc rester attentif à la relation étroite entre le contrat et le service public.
Si le contrat est conclu pour satisfaire les besoins du service (fournitures, transport) il n’a pas de ce fait un caractère administratif.
Il s’agit du critère de la clause exorbitante du droit commun des contrats. Les stipulation du contrat confèrent aux parties des droits ou des obligations étrangères par leur nature à celle du droit commun (C.E., 2 octobre 1950, Stein).
La clause pénale inscrite dans le contrat, et prévoyant une utilisation unilatérale de celui-ci au profit de l’administration exprime tout à fait cette idée.
Il convient de préciser qu’une seule clause exorbitante suffit à imprimer au contrat un caractère administratif ; même si le contrat n’a pas un rapport direct avec le service public. Ainsi la signature par une administration d’un contrat conclut pour l’exploitation de son domaine privé (Tribunal des Conflits, 24/01/53, Conservateur des eaux et forêts de la Corse).
Notons toutefois une exception, si le contrat est passé entre un service public industriel et commercial et un usager comporte une clause exorbitante, celle-ci ne lui confère pas le caractère administratif.
De même, un contrat peut être conclu avec un régime exorbitant tel le contrat conclu dans un contexte juridique imposé par le législateur et entraînant pour les parties des obligations inconnues dans le droit commun des contrats. (C.E. 19/01/1973, rivière du Sant).
Toutefois, le contrat conférant à un particulier l’exécution même d’un service public comporte souvent des clauses exorbitantes et confère ainsi la responsabilité du service à une personne n’ayant pas le caractère d’agent public.
Au surplus, un contrat passé par un service public administratif bénéficie d’une présomption simple lui attribuant le caractère de droit privé.
Cette présomption devient irréfragable si le contrat est passé avec les usagers du service public industriel et commercial. Il est nécessairement de droit privé même s’il comporte des clauses exorbitantes de droit commun.
Enfin, il nous parait nécessaire de bien préciser que ces deux critères d’exécution d’un service public et la clause exorbitante ne sont pas cumulatifs mais alternatifs, un seul de ces critères surfit pour donner au contrat sa qualification administrative.
Mais quelles sont les conséquences d’une telle qualification ? Il convient donc de les envisager dans leur ensemble.
Selon la qualification retenue le contrat se trouve soumis au régime de droit commun ou au contraire à un régime particulier tant au niveau de l’ordre juridique compétent pour dénouer tout éventuel contentieux, que les prérogatives de puissance publique qui inspirent ce caractère particulier au contrat.
Il importe ici de déterminer les règles de compétences qui régissent les tribunaux administratifs régionaux et de montrer les différents niveaux de procédure que peut suivre le contentieux du contrat administratif. Car entre le régime de droit public applicable à ces contrats et la compétence du juge administratif il existe une interdépendance complète.
La compétence de principe du tribunal administratif se déduit de la qualité de juge de droit commun: les exceptions à cette compétence étant ici très limitées.
Le contentieux contractuel réservé au juge du contrat s’entend très largement, puisqu’il comprend tous les litiges se rapportant à la formation du contrat, à sa validité, à son interprétation, à son exécution et à sa résolution ou à son terme.
Aussi le juge se trouve normalement saisi dans le cadre du plein contentieux. Dès lors le requérant peut présenter des demandes d’annulation. des demandes de résiliation ou d’indemnité pour modification des conditions d’exécution du contrat pour imprévision, bouleversement de l’économie du contrat.
Toutefois, cette action se trouve limitée à deux points de vue : l’interdiction pour le juge administratif d’adresser des injonctions à l’administration et l’impossibilité pour lui d’annuler les mesures prises par l’administration à l’égard de son cocontractant alors que celles-ci sont irrégulières (C.E. 20 décembre 1961, soc. Ouest Peinture).
Rappelons tout d’abord la compétence exceptionnelle du Conseil d’ État comme juge en premier ressort, en matière de contentieux international. Un seul chef de compétence est susceptible de nous intéresser dans le cadre de ce contentieux. Il s’agit des litiges d’ordre administratif nés hors du territoire français soumis à cette juridiction aux tribunaux administratifs et des conseils du contentieux administratif. Ce sont les contrats administratifs dont le lieu d’exécution est à l’étranger.
Indépendamment de cette exception, il n’en demeure pas moins que le Conseil d’ État dispose en la matière de larges attributions contentieuses puisque selon le cas il est juge d’appel ou juge de cassation à l’égard des juridictions administratives régionales. Il est juge de cassation de toutes les décisions dégagées de juridiction qui est de principe en matière civile s’applique plus souvent en matière administrative.
Les règles de compétence envisagées dont nous devons toutefois préciser les règles de compétence territoriale en cette matière contractuelle. Le juge détermine d’après le lieu d’exécution et subsidiairement cette compétence d’après le lieu de sa signature. (art. 13 du Règlement d’administration publique du 28 novembre 1953) (N.B. les règlement d’administration publique n’existent plus).
Les règles exprimant bien le particularisme que revêt le contrat administratif, particularisme encore renforcé par les prérogatives de puissance publique qu’il suppose fréquemment.
Le régime du contrat administratif reflète directement la singularité de ce contrat et ses dispositions l’éloignent alors franchement du régime de droit commun. Les prérogatives de puissance publique, ensemble générique s’articulent principalement autour de l’imprévision et de la révision unilatérale du contrat administratif envisageons ces différentes prérogatives de puissance publique.
Dans le cadre du contrat administratif l’autorité publique dispose de larges prérogatives tenant du droit de modification des conditions d’exécution du contrat. Toutefois, ce pouvoir de modification ne doit pas pour autant conduire à un véritable bouleversement du contrat, le cocontractant doit pouvoir bénéficier d’un certain équilibre financier.
En effet, une « équation financière » existait entre les parties lors de la conclusion du contrat. Mais il peut y avoir rupture de cette « équation financière » par l’usage que fait la personne publique de ses prérogatives. Dans un tel cas de figure, elle doit indemniser le cocontractant de la totalité de ces charges (frais engagés pour l’exécution du contrat).
Mais il faut distinguer cette situation du bouleversement de l’économie générale du contrat en raison des circonstances extérieures à la personne publique contractante. La théorie de l’imprévision suppose la réunion de plusieurs conditions.
Tout d’abord, la modification de l’équilibre financier est dû à des circonstances non imputable à l’une des parties. En second lieu, cet équilibre financier doit être préservé dans la mesure où il est nécessaire à la continuité du service public. Il faut donc un véritable bouleversement et non la survenance d’un aléa normal. Dans cette hypothèse, et sous réserve de la réunion de toutes ces conditions, l’indemnité d’imprévision ne couvrira pas la totalité du déficit du cocontractant.
Ainsi l’autorité publique dispose d’un pouvoir de modification unilatérale des conditions d’exécution du contrat. Mais cette modification comme nous l’avons vue ne peut porter directement sur les clauses financières, elle concerne uniquement la substance même du contrat. De même, elle bénéficie de larges prérogatives tenant au droit de direction et de contrôle dans l’exécution du contrat. Enfin, l’exécution du contrat peut être enrichie ou substantiellement altérée par intervention de l’autorité publique. Le pouvoir modificateur reste licite sous certaines conditions et peut ouvrir droit à indemnité. C’est le fait du Prince. Toutefois, en cette matière la jurisprudence administrative semble assez floue quant à sa définition et son exercice. Rappelons tout de même que des mesures générales frappant ce cocontractant de façon non spéciale ne donneront pas droit à indemnité.
En revanche, des mesures spéciales frappant particulièrement le cocontractant pourront ouvrir droit à indemnité.