L’INEXÉCUTION DU CONTRAT

Introduction

L’obligation contractuelle est inexécutée dès qu’elle n’a pas reçu exécution à échéance prévue.

Les contrats peuvent engendrer trois types d’obligations :

L’obligation de donner, qui est l’obligation de transférer la propriété qui résulte fondamentalement du contrat de vente.

L’obligation de faire (art. 1142 à 1144 C. civ .) qui est l’obligation qu’engendrent les contrats de prestations de services et dont le droit fixe le régime type sous le nom de contrat d’entreprise.
Ainsi, il est possible de contraindre un occupant à libérer les lieux, un acheteur à prendre livraison, un bailleur à délivrer au locataire la chose prévue.

L’obligation de ne pas faire (art 1145 C. civ.) qui n’est pas stéréotypée par un contrat déterminé, elle se rencontre en pratique comme une obligation accessoire d’une obligation de donner ou de faire, notamment sous la forme des obligations de secret et des obligations de non concurrence. On peut citer l’exemple de l’interdiction sous astreinte d’une somme de x francs par infraction prohibée, d’exercer l’activité prohibée par un engagement de non concurrence.

Le non respect des obligations contractuelles, permet au créancier de l’obligation dans la mesure où il s’est prémuni de la preuve de l’inexécution (par expertise judiciaire) d’obtenir le droit à réparation, sous forme de dommages et intérêts, la résiliation, et le remplacement ou la réfaction ou la résolution. Il peut aussi invoquer l’exception d’inexécution du contrat.

Les articles 1189 à 1196 du C. civ. déterminent les conditions d’inexécution du contrat.

Nous examinerons dans un premier temps, les conditions de l’inexécution du contrat et dans un second temps leurs effets et leurs conséquences.

 

I - LES CONDITIONS DE L’ INEXÉCUTION DES CONTRATS

Divers remèdes sont à la disposition du cocontractant victime des carences d’exécution, mais ils ne sont efficaces que s’ils sont régulièrement utilisés. Pour réagir valablement, celui qui se plaint doit avant tout établir l’existence de l’inexécution, se prémunir de la preuve d’une inexécution et s’assurer qu’il est en droit d’invoquer l’inexécution.

Il doit, si ses intérêts sont menacés, demander au juge d’ordonner les mesures conservatoires qu’il considère appropriées.

 

A. Établissement de l’inexécution (la mise en demeure, la preuve)

Le contrat est inexécuté lorsque les obligations prévues au contrat n’ont pas été accomplies, dès que ce qui a été promis n’a pas été tenu, ce qui devait être fait n’a pas été fait ou ne l’a pas été comme convenu; ce qui ne devait pas être fait l’a été.

Lorsque l’obligation est alternative, par exemple, cas où le débiteur peut s’acquitter en plusieurs devises selon son choix, elle est réputée inexécutée :

Cependant, il est recommandé aux parties de se prémunir de la preuve d’une inexécution au besoin par constat d’huissier ordonné en justice ou par expertise judiciaire, constat contradictoire, référé préventif.

La preuve joue un rôle primordial en droit. En effet, la sanction judiciaire d’un droit contesté ne pourra être obtenue qui si la preuve de l’acte ou du fait juridique qui lui a donné naissance est rapportée.

La charge de la preuve incombe aux demandeurs et elle porte ici sur l’acte juridique qui conditionne son application. En principe, il appartient à chaque partie de prouver les faits qu’elle invoque (art 9 N.C.P.C.).

Mais elle peut demander au juge de l’aider.

Le juge peut confier à un expert de son choix le soin de rechercher des faits ou de donner un avis technique c’est ce que l’on appelle l’expertise.

Par exemple, estimer la valeur d’un fonds de commerce en cas de contestation sur le caractère sérieux du prix, ou un immeuble.

La preuve des actes juridiques n’est pas libre, en principe un écrit est nécessaire. Le contrat constitue l’exemple type de l’acte juridique. La preuve de l’existence d’une telle convention ne peut se faire que par écrit, en principe (sauf contrat commercial et si - 5 000 F).

Les écrits constatant des contrats synallagmatiques doivent être dressés en autant d’originaux que de parties ayant des intérêts opposés, et mention du nombre des originaux dressés doit figurer sur chaque original.

La mise en demeure est toujours exigée si le contrat le prévoit et dans les conditions fixées par celui-ci.

Elle l’est aussi même si le contrat ne l’a pas prévue. (point de départ pour le calcul des dommages et intérêts).

Elle n’est pas nécessaire d’une part si le contrat l’a écartée et d’autre part si l’exécution était impossible, comme par exemple dans un cas de force majeure, si le débiteur a laissé passer les délais d’exécution, si l’inexécution est avisée, ou si le débiteur refuse formellement d’exécuter.

Mettre en demeure, c’est mettre en retard le débiteur. Tant que le créancier n’a pas mis en demeure son débiteur, il est présumé lui accorder des délais et rie peut donc demander ni l’exécution forcée du contrat, ni sa résolution, ni l’allocation de dommages et intérêt.

La mise en demeure peut résulter d’une lettre simple ou recommandée, pourvu que ce qui est demandé soit nettement précisé et qu’il ressorte des circonstances que la demande constitue une interpellation suffisante.

Elle peut aussi résulter d’une demande en justice d’exécution du contrat.

 

B. Le droit d’invoquer l’inexécution et les mesures de sauvegarde du contrat

Une partie ne peut pas se plaindre de l’inexécution du contrat par son cocontractant si elle l’a mis elle même dans l’impossibilité d’exécuter. Il ne faut pas que durant l’exécution du contrat l’on ait fait apparaître une volonté contraire face à l’exécution.

Tout manque de réaction de notre même peut paraître une acceptation facile de notre part.

Nous avons une admission de la renonciation par exemple dans le cas où deux associés d’une société ont décidé de liquider la société et de se répartir le boni de liquidation, celui qui choisit de liquider toutes ses parts au lieu d’attendre que la société soit liquidée a renoncé par là même à se prévaloir du protocole prévoyant le partage du boni de liquidation...

Les juges refusent l’existence d’une renonciation dans le cas par exemple où l’acquéreur d’un ordinateur qui revend cet appareil à un tiers ne renonce pas sans équivoque à se prévaloir de la clause du contrat de vente, l’autorisant à refuser le matériel acheté après une période d’essai.

La volonté contraire est parfois affirmée dans le contrat les parties précisant que leur manque de diligence n’équivaudra pas à une renonciation à leurs droits.

La partie qui estime que le contrat n’est pas exécuté ou qu’il est mal exécuté doit prendre des mesures de sauvegarde afin de préserver et de protéger ses intérêts en ayant recours à des mesures conservatoires (mise en demeure, référé, contrat, etc.).

La partie doit faire attention aux délais de la prescription et ne doit pas omettre de prévenir ses garants pour l’inexécution du lieu contractuel.

En cas de menace urgente ou de trouble manifestement illicite, de péril imminent ou de conservation de preuve, elle peut faire appel au juge des référés qui est le président de la juridiction compétente.

Elle peut enfin prendre des précautions contre le risque d’insolvabilité de son cocontractant en prenant une inscription d’hypothèque provisoire sur les immeubles de ce dernier, un nantissement de fonds de commerce ou en pratiquant une saisie conservatoire sur tout bien meuble, ou un gage sur les véhicules.

  

II - LES EFFETS ET LES CONSÉQUENCES DE L’INEXÉCUTION D’UN CONTRAT

Le contractant qui subit un dommage, du fait de l’inexécution ou de la mauvaise exécution du contrat par l’autre partie peut en demander réparation en principe sous forme de dommages et intérêts, il peut obtenir le remplacement, la réfaction ou la résolution ou résiliation du contrat. Il est aussi en droit d’invoquer l’exception d’inexécution (contrat synallagmatique).

Cependant, l’inexécution ne doit pas provenir d’un cas de force majeure, c’est à dire d’un évènement imprévisible ( irrésistible), insurmontable et extérieur à la personne.

L’exception d’inexécution, le remplacement, la réfaction et la résolution du contrat

Tant que l’un des contractants ne s’exécute pas, l’autre peut refuser d’exécuter sa propre prestation.

Elle peut invoquer l’exception d’inexécution par exemple, l’acquéreur d’une chose peut refuser de la payer tant que la propriété ne lui a pas été transférée. Cette exception d’inexécution est soumise à 4 conditions :

L’exception d’inexécution a un effet immédiat qui est le blocage de l’exécution des obligations contractuelles.

Mais, ce n’est qu’une situation temporaire, un moyen souvent efficace, de contraindre le débiteur à s’exécuter. Si la situation persiste, le créancier a la possibilité d’obtenir le remplacement du co-contractant, c’est à dire que le contractant qui n’obtient pas l’exécution du contrat peut être autorisé par justice à faire exécuter lui même l’obligation aux dépens de son cocontractant défaillant.

Il peut aussi obtenir la réfaction du contrat, c’est à dire une diminution du prix. Cette diminution est opérée par le juge compétent lorsque l’engagement n’a pas été exécuté conformément aux prévisions du contrat (loi des parties).

Cependant, s’il n’obtient toujours pas satisfaction il peut invoquer la résolution pour inexécution, qui est l’anéantissement du contrat et lui produit les mêmes effets que la nullité.

La révocation : résolution ou résiliation, suppose la réunion de trois conditions :

  1. Un contrat synallagmatique :
    Une inexécution totale ou du moins, suffisamment importante. Peu importe qu’elle soit fautive ou non. Cependant, si elle est due à un cas de force majeure, il ne s’agit plus d’un problème de résolution mais d’application de la théorie des risques.
  2. L’intervention du juge :
    le prononcé de la résolution est facultatif pour les tribunaux qui peuvent accorder un délai de grâce, au maximum 24 mois, maintenir le contrat en octroyant des dommages intérêts, prononcer la résolution en l’assortissant, éventuellement, d’une condamnation ou versement de dommages et intérêts.


  3. Lorsque le créancier ne peut pas obtenir de son débiteur l’exécution en nature de son obligation, celle-ci se résout en dommages intérêts. On dit qu’il y a exécution par équivalent.

    La loi et la jurisprudence ont fixé un certain nombre de règles pour les engagements inexécutées ou mal exécutées.

    • Les règles légales de la responsabilité contractuelle, selon les stipulations du contrat, les obligations que doit assurer le débiteur revêtent plus ou moins d’intensité. Le plus fréquemment, il s’engage sur une obligation de résultat (par exemple, le bail, la vente, le transport) mais parfois il ne promet que «faire de son mieux» (avocats médecins, conseils juridiques ...) on parle alors d’obligations de moyens.
    • La responsabilité contractuelle entraîne la condamnation ou versement de dommages intérêts. Ces sommes d’argent sont rarement fixées par la loi et souvent laissées à l’appréciation souveraine des juges du fond.

      Excepté dans les cas où la loi interdit au débiteur de prestations contractuelles déterminées de s’exonérer de toute réparation (en matière de transport, en matière de vente ).

      Dans tous les autres cas on est tenu à la réparation des dommages que l’on a causés.

      Cependant on doit en tout état de cause réparation en cas de faute intentionnelle, lorsque la faute est équivalente à un dol, en cas de faute lourde, lorsque le dommage est d’origine délictuelle.

      Il est fréquent que les parties contractantes aménagent, à l’avance, les conséquences d’une éventuelle inexécution de leurs obligations.

      Il est des stipulations qui aggravent la responsabilité du débiteur (par exemple, absence d’effet exonératoire de la force majeure) mais elles sont rares. Plus fréquemment sont insérées des clauses de non-responsabilité ou limitative de responsabilité et des clauses pénales.

      Les clauses de non-responsabilité suppriment toute responsabilité du débiteur en cas d’inexécution de son obligation de moyen ou de résultat.

      Cependant, elles sont sans effet :

      • pour les dommages causés soit à la personne humaine, soit en cas de faute dolosive ou de faute lourde ;
      • dans certaines hypothèses prévues par la loi.

      Les clauses limitatives de responsabilité peuvent prendre les formes les plus diverses, par exemple, plafonner le montant des dommages intérêts ou prévoir que le débiteur ne sera pas responsable des évènements qu’il n’a pu surmonter malgré une «diligence raisonnable».

      Ces clauses sont efficaces sauf, en cas de faute dolosive du débiteur . Si la loi les interdit ou, si la loi fixe impérativement le plafond de la responsabilité .

      Les clauses pénales sont celles par lesquelles les parties conviennent d’une somme forfaitaire à verser en cas d’inexécution, de retard ou mauvaise exécution (art. 1152 du C. civ.).

      Le créancier ne peut pas, en principe demander des dommages intérêts d’un montant supérieur à celui qui est fixé par la clause, sauf :

      • Pour faute dolosive ou faute lourde du débiteur, si la clause est manifestement dérisoire.

      Le débiteur ne peut pas non plus obtenir des tribunaux une réduction de la pénalité excepté si elle est manifestement excessive et en cas d’exécution partielle de l’obligation par le débiteur.

      Un dommage est réparable s’il est certain, direct et personnel. Cependant seul le dommage contractuel prévisible est réparable, on doit réparer le dommage que l’on a causé et la victime d’un dommage a droit, avant tout au remboursement de ces pertes à savoir :

      • toutes les dépenses que le dommage a occasionnées: le remboursement de la détérioration ou dépréciation des biens endommagés, le remboursement du financement des pertes subies ;

      • la victime pourra aussi demander réparation de son préjudice commercial et moral, de la perte de clientèle, de la perte de la chance de tirer parti du contrat.

      Les contractants peuvent également faire état des conditions et causes de la force majeure dans leurs contrats.

      Les parties peuvent invoquer la force majeure pour s’exonérer de leurs responsabilités.